jeudi 23 avril 2009

des saisons, des dictons et des chansons





Synthése de nombreux articles sur le sujet qui s'enrichira de vos dictons.





Tous les jardiniers vous le diront : il ne faut pas négliger l'influence de la Lune et surtout, il faut se méfier de la «lune rousse» . La fameuse lune rousse qui tant épouvantait ma mère !
La lune rousse c’est la lune qui commence en avril, après la fête de Pâques. Cette année elle commencera le 25 avril pour se terminer le 24 mai, et durant cette période défileront tous les «saints de glace» et les «Rogations» hélas disparues aujourd’hui par décision vaticane.

Les dictons sur le temps ont été écrits après que nos anciens aient observé que des phénomènes atmosphériques se produisaient de façon répétitive chaque fois que la lune se trouvait dans une même configuration ou phase: nouvelle, croissante, pleine, décroissante ou vieille. La référence à tel ou tel saint du calendrier était un procédé mnémotechnique, la vie était alors rythmée par les fêtes liturgiques et la journée par l’Angélus. Ces dictons sur le temps c'est souvent de la poésie, c’est quelquefois vrai pour le temps, et presque toujours vrai pour les plantes… et même pour l’humeur de certaines personnes ! C’est bien connu. La police peut attester des problèmes qu’elle enregistre les nuits de pleine lune, et nous connaissons tous des gens «mal lunés».

«Lune rousse, vide bourse» ; «lune rousse, rien ne pousse» ; «Gelée de lune rousse de la vigne ruine la pousse» ; «Récolte n’est point assurée que la lune rousse soit passée»....
La lune rousse est plus redoutée que les autres parce qu’elle se situe au moment où le printemps arrive, la sève des plantes monte et nos humeurs aussi. Aussi a-t-elle plus d’influence que d’autres lunaisons. C’est pendant la lunaison de la lune rousse que nous allons rencontrer les saints de glace et leur désastreuse influence . Du moins parlons nous de celle de la lune et non de celle de nos dévoués saints . Pourquoi rousse ? Ce n’est pas à cause de sa couleur qu’on l'appelle ainsi. C’est à cause des effets qu’elle produit sur les plantes qu’elle est «rousse». Les calendriers lunaires nous donnent une bonne explication. En cette période de l’année, le soleil déjà haut reste de plus en plus avec nous (+1h30 pour le mois d’avril). Quand le ciel est dégagé, le thermomètre indique 15 ou 18 degrés, voire plus, en plein milieu de la journée. Les petites pousses et les fruits en formation se gorgent de chaleur. Mais la terre met très longtemps à se réchauffer. Quand le soleil se couche, le froid se rétablit vite puisque la terre n’a pas encore de chaleur à restituer. Progressivement la rosée qui recouvre les végétaux peut devenir glaciale au lever du jour. Et quand le thermomètre indique 0°, voire en dessous, les jeunes espoirs de récolte sont détruits et les petites pousses et les embryons de fruits prennent alors une apparence de roussi. Ne rangez donc pas les protections de vos plantes et arbres avant la fin de la lune rousse. Elles peuvent toujours être utiles la nuit.

Il y a aussi fort à parier que la référence à cette couleur rousse fait également allusion au caractère maléfique (supposé !) de notre amie céleste, pourtant si «douce au miséreux et aux amoureux» comme le dit si joliment la fameuse «complainte de la Butte». Car les rousses, disait-on au temps jadis, portaient sur la tête rien de moins que les flammes de l’enfer. Elles étaient suspectes de sorcellerie, redoutées sur les bateaux, accusées de faire tourner le lait et de rancir le beurre. Dès lors rien d’étonnant à ce qu’une rousse, toute planète qu’elle soit, fasse tourner le printemps, rire jaune le jardinier, et jette la désolation au potager !

Cette lune rousse d’avril est plutôt d’ailleurs une lune souvent toute pâle, de cette pâleur qui «caresse l’opale de tes yeux blasés». Cette lune blême qui «jette un diadème» sur les cheveux roux de la petite mendigote de la rue Saint Vincent, a-t-elle donc vraiment une responsabilité personnelle dans les ravages infligés aux végétaux qui vident la bourse des paysans ! Est-elle vraiment responsable cette lune qui inspire une si belle complainte ? En tous cas l’auteur de la belle Complainte de la Butte avait bien observé le temps : «Mais voilà qu'il flotte, La lune se trotte, La princesse aussi. Sous le ciel sans lune, Je pleure à la brune, Mon rêve évanoui !» .


Voila pour ce qui est de la lune Rousse. Voyons maintenant le cortège des Saints de glace et les processions des Rogations: Avec Saint Georges le 23 avril, on aborde la période où ils vont sévir. La fête de ce saint est accompagnée d’une kyrielle de proverbes et de dictons sur la pluie. Or la nouvelle lune sera le 25 et le périgée le 28. Gare !
«Pluie de saint Georges, coupe les cerises à la gorge !» ou encore : «S’il pleut à la saint Georges, de cent cerises restent quatorze». Et aussi : «S’il pleut à la saint Georgeau, n’y aura guignes ni bigarreaux».
Le 25 avril c’est la Saint Marc : «s’il pleut le jour de la saint Marc, les guignes couvriront le parc» ; ou encore : «A la saint Marc s’il tombe de l’eau, il n’y aura pas de fruits à couteau». C’est à dire de fruits dont on enlève la peau avec un couteau pour les manger. «Marquet (Marc), Georget (Georges), et Philippet (Philippe), sont trois casseurs de Gobelets». Saint Philippe était autrefois fêté le 1er mai. Pourquoi casseurs de gobelets ? Parce que le froid ou la grêle ces jours–là est néfaste pour la vigne, donc au vin, donc aux pichets et aux gobelets. On dit encore : Trois saints dont faut se méfier »…Saint Robert le 29 avril : «Gelée de saint Georges, saint Marc, saint Robert, récolte à l’envers» . Mais on dit aussi : «A la Saint-Robert, tout arbre est vert» ou encore «La pluie de saint Robert, du bon vin emplira ton verre.» Si donc il pleut à ce jour-là, tout ne sera pas négatif…Par contre s’il pleut ensuite pour les saints suivants ce sera différent :
Le 30 avril pour Saint Eutrope (ou Tropet) : «saint Eutrope mouillé, Cerises estropiées.»Du 23 avril au 6 mai, ces saints sont aussi appelés «les saints cavaliers» ou «les saints chevaliers» ou encore, selon Rabelais : «les saints gresleurs et gasteurs de bourgeons».
«Les saints de glace» ne seraient, selon certaines interprétations, que les suivants, dont la liste se déroule en mai soit pour les derniers jours de la lune rousse, et en particulier, ceux dont on parle le plus les 11,12 et 13 mai : «Mamert, Servais et Pancrace, voilà les trois saints de glace» . Ils sont les plus célèbres et on limite trop souvent les saints de glace à eux seuls : «Les Servais, Pancrace et Mamert à eux trois, un petit hiver". Aujourd'hui encore les agriculteurs et les jardiniers ne négligent pas ce vieux dicton: «Attention, le premier des saints de glace, souvent tu en gardes la trace." Or la pleine lune en mai sera le 9 avec l’apogée le 14 et un nœud lunaire le 15. Il faudra regarder ce qui va se passer. «Méfiez-vous de saint Mamert, De saint Pancrace et de saint Servais,car ils amènent un temps frais et vous auriez regret amer», mais ne cherchez plus leurs noms dans vos calendriers. Ils ont été remplacés par Estelle, Achille et Rolande. Cette substitution fut décidée après le dernier concile Vatican II lorsqu’on nettoya le calendrier de tous les personnages «douteux» qui avaient souvent donné lieu à des pratiques rituelles peu conformes avec la liturgie et entachées de fond païen. C’est ainsi que ces saints de glace si réputés furent rayés de nos calendriers, ainsi que les Rogations. Les supprimer n’a rien changé au temps et aux influences de la lune. Le mauvais temps et les dégâts qu’il a souvent entraîné, en ces périodes, avait inspiré à Saint Mamert, évêque de Vienne, en Dauphiné, vers 420-477 des prières et des litanies parce que des calamités avaient ravagé les fruitiers de la vallée du Rhône. Ce sont les fameuses «Rogations» qui ont été étendues à toute la chrétienté en 816, pour les trois jours avant la fête de l’Ascension. C’est à dire cette année les 18, 19 et 20 mai, en pleine lunaison de «lune rousse».
Qui se souvient encore de ces petits matins de mai où curés et parfois vicaires, enfants de chœur et paroissiens, partaient en procession derrière la croix, à travers champs et prés au rythme de «Ut nobis parcas» ou «Ut fructus terrae, dare et conservare digneris» «Te rogamus audi nos».
Les fidèles quittaient leur domicile pour s’unir à la procession. La supplication des litanies s'élevaient dans le calme du matin. Nous t’en prions, nous t’en supplions Seigneur, protège les fruits de la terre, écoute nous ! Le curé à coups de goupillon bénissait les moissons en herbe, les arbres en fleurs et les animaux qui paissent. La procession s’arrêtait parfois devant les fontaines et les puits, dans lesquels le prêtre jetait du sel pour les purifier. On portait ici ou là les reliques du saint local. . Beau temps le premier jour des Rogations était un heureux présage pour le foin, le deuxième pour la moisson, le troisième pour les vendanges. Pendant ces trois jours on prenait garde de ne pas faire la lessive : «Celui qui lessive aux Rogations sera au lit aux moissons». Un autre proverbe plus menaçant affirme «Quand on lave aux Rogations, il sort un corps de la maison !».
A la fin de la série, en fin de la lunaison cette année 2009, le 24, Il y a un quatrième saint de glace, saint Urbain le 25 mai, qui annonce la fin des possibles gelées : «Le vigneron est rassuré qu'une fois la saint Urbain passée»
Si on regarde l’histoire de la météo on trouve que, en l’année 1897, par exemple, du 11 au 13 mai, il a gelé, et les dégâts ont été d’autant plus importants que l’hiver avait été bénin, et que la végétation était bien avancée ! Cette année là, dans tout le pays, ce fut une catastrophe. Dans nos histoires locales, on trouve partout traces de ces gels dus aux méfaits des saints de glace, mais surtout à la lune rousse.

Alors écoutons nos anciens qui nous conseillent de prendre notre mal en patience en nous rappelant : «On n’est pas sorti de l’hiver qu’avril n’ait montré son derrière» ou encore « Il n'est point d'avril si beau, qui n'ait neige à son chapeau. » et restons prudent: « En avril, ne te découvre pas d'un fil » car « celui qui s'allège avant le mois de mai, certainement ne sait pas ce qu'il fait."

Prenez bonne note amis jadiniers de ces sages leçons et surtout espérez avec moi, amis vacanciers, aux jours meilleurs du bel été tout proche qu'en un quatrain le poète annonce pour demain :
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie
Et s'est vêtu de broderies,
De soleil luisant, clair et beau

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